I- Rappel des textes applicables
Aux termes de l’article 175-2 du Code civil :
« Lorsqu’il existe des indices sérieux laissant présumer, le cas échéant au vu de l’audition ou des entretiens individuels mentionnés à l’article 63, que le mariage envisagé est susceptible d’être annulé au titre de l’article 146 ou de l’article 180, l’officier de l’état civil saisit sans délai le procureur de la République. Il en informe les intéressés.
Le procureur de la République est tenu, dans les quinze jours de sa saisine, soit de laisser procéder au mariage, soit de faire opposition à celui-ci, soit de décider qu’il sera sursis à sa célébration, dans l’attente des résultats de l’enquête à laquelle il fait procéder. Il fait connaître sa décision motivée à l’officier de l’état civil, aux intéressés.
La durée du sursis décidé par le procureur de la République ne peut excéder un mois renouvelable une fois par décision spécialement motivée.
A l’expiration du sursis, le procureur de la République fait connaître par une décision motivée à l’officier de l’état civil s’il laisse procéder au mariage ou s’il s’oppose à sa célébration.
L’un ou l’autre des futurs époux, même mineur, peut contester la décision de sursis ou son renouvellement devant le président du tribunal judiciaire, qui statue dans les dix jours. La décision du président du tribunal judiciaire peut être déférée à la cour d’appel qui statue dans le même délai. »
Aux termes de l’article 176 du Code civil :
« Tout acte d’opposition énonce la qualité qui donne à l’opposant le droit de la former. Il contient également les motifs de l’opposition, reproduit le texte de loi sur lequel est fondée l’opposition et contient élection de domicile dans le lieu où le mariage doit être célébré. Toutefois, lorsque l’opposition est faite en application de l’article 171-4, le ministère public fait élection de domicile au siège de son tribunal.
Les prescriptions mentionnées au premier alinéa sont prévues à peine de nullité et de l’interdiction de l’officier ministériel qui a signé l’acte contenant l’opposition.
Après une année révolue, l’acte d’opposition cesse de produire effet. Il peut être renouvelé, sauf dans le cas visé par le deuxième alinéa de l’article 173.
Toutefois, lorsque l’opposition est faite par le ministère public, elle ne cesse de produire effet que sur décision judiciaire. »
Aux termes de l’article 177 du Code civil :
« Le tribunal judiciaire prononcera dans les dix jours sur la demande en mainlevée formée par les futurs époux, même mineurs. »
Aux termes de l’article 178 du Code civil :
« S’il y a appel, il y sera statué dans les dix jours et, si le jugement dont est appel a donné mainlevée de l’opposition, la cour devra statuer même d’office. »
Aux termes de l’article 8 – « Droit au respect de la vie privée et familiale » de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales :
« 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.
- Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »
Aux termes de l’article 12 – « Droit au mariage » de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales :
« A partir de l’âge nubile, l’homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l’exercice de ce droit. »
Aux termes de l’article 14 – « Interdiction de discrimination » de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales :
« La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. »
II- L’opposition à mariage du procureur de la République
Lorsque le procureur de la République a un doute sur la sincérité de l’union projeté, il rend une décision consistant en une opposition à mariage.
Cette décision ne peut toutefois intervenir que lorsque le procureur de la République peut demander la nullité du mariage (à chaque fois que le projet ne respecte pas une condition de validité du mariage).
La nullité du mariage est encourue si l’un ou les deux partenaires ne consentent pas véritablement à se marier (hypothèses des mariages « blancs » où les deux époux contractent un mariage pour en tirer un avantage, et non pour partager une vie commune mais aussi des mariages « gris » lorsque l’un seulement des époux n’était pas réellement sincère).
N.B. la non-publication des bans ne peut pas motiver l’opposition à mariage du Procureur de la République.
Pour fonder l’opposition à mariage, le procureur de la République doit respecter :
- des conditions de forme : la signature de la décision, une motivation, la signification aux deux époux, etc
- des conditions de fond : le procureur de la République doit mettre en avant les éléments factuels ayant fondé l’opposition à mariage et représentant des indices sérieux de mariage blanc ou gris.
N.B. La loi exige pour fonder l’opposition à mariage des « indices sérieux » laissant présumer que le mariage encourt la nullité.
III- La mainlevée de l’opposition à mariage du procureur de la République
Les futurs époux peuvent solliciter la mainlevée de l’opposition à mariage du procureur de la République en démontrant que :
- l’opposition à mariage ne respecte pas une ou plusieurs conditions de fond : le défaut d’énonciation de la qualité qui donne à l’opposant le droit de la former ; l’absence des motifs de l’opposition ; l’absence des reproductions du texte de loi sur lequel est fondée l’opposition ; le défaut d’élection de domicile dans le lieu où le mariage doit être célébré ; le défaut de signification aux deux futurs époux ;
- la sincérité de leur projet d’union : le partage de valeurs communes, etc.
Il appartient aux futurs époux, même mineurs, d’attraire le procureur de la République concerné devant le Tribunal judiciaire compétent.
La représentation des futurs époux par un avocat est obligatoire.
Le Tribunal judiciaire doit se prononcer dans un délai de 10 jours à compter de la demande en mainlevée.
Si un appel est relevé par l’une ou l’autre des parties, la Cour d’Appel doit statuer dans un nouveau délai de 10 jours.